Jour 265 – Courir

courirCourir. Ceux qui me connaissent savent que je cours (premier marathon, Paris, en 1993…). Et donc ce matin, vers le 6 heures, aux alentours du lever du soleil, j’ai enfilé les baskets et suis parti dans les rues d’Abidjan. J’avais repéré mon parcours hier, mais l’expérience était différente ce matin. Certes plus de taxis, et donc de fumée noirâtre à l’aspect peu ragoutant, mais plus de gens tout court. Entre les jeunes en uniforme qui se rendent à l’école (et oui à 6 heures…), les hommes en costume, les femmes en robes traditionnelles, et la foule, une majorité marche.

On marche en Afrique, beaucoup, parfois de loin, tous les jours, pour se rendre à son travail, souvent payé une misère. Et puis il y a les coureurs, comme moi. Enfin, pas tout à fait comme moi, ce sont des locaux, je suis l’étranger, le blanc. Pourtant chacun ou presque va me saluer, et je vais rendre ce salut. Je fais partie de la communauté des coureurs, peu importe la couleur de ma peau. Peut-être la citation de Kwame Nkurumah, ancien président du Ghana, prend alors tout son sens : « nous sommes Africains non parce que nous sommes nés en Afrique, mais parce que l’Afrique est née en nous ». Alors aujourd’hui je me sentais Abidjanais…

Et puis ces arbres… magnifiques, gigantesques, défonçant chaussée et trottoir de leur racines, mais majestueux (certains avaient d’ailleurs des airs de micocoulier, celui dont les racines défoncent notre terrasse et que mon épouse ne veut absolument pas couper). Au détour d’une rue, un attroupement de lecteurs de journal. Tous en demi-cercle autour des pages du journal étalées par terrer et tenues par des cailloux. Spectacle qui peut faire sourire, mais à la fois économique et communataire.

La propreté. Ces petites femmes vertes (comme les « petits bonshommes oranges », comme les appellent mes enfants à Maurice) qui balaient sans relâche les rues et les trottoirs. Pas un papier, pas un gobelet, pas un sac plastique, qui n’est balayé et ramassé par ces travailleuses. Le Plateau est délabré par endroit, mais propre ! Quel bonheur. Quel contraste avec Dakar aussi !

Et puis, en passant près du stade Houphouët-Boigny, une plaque commémorative aux victimes du 29 mars 2009. Souvenir d’une bousculade en marge du match de qualification pour la coupe du monde qui opposait la Côte d’Ivoire au Malawi. 29 personnes avaient alors trouvé la mort.

Courir, tôt le matin, fait sentir la ville, le pays, ses habitants. On participe à ce réveil, cette « grande respiration du monde », qui fait se sentir bien, pièce unique d’un puzzle qui nous dépasse.

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