Les données sont Atomiques

On entend souvent que les données sont le nouveau pétrole. Le sous-entendu est qu’elles sont le carburant de l’économie. Mais, comme le soulignait Bernard Marr dans un article de Forbes, le pétrole est une ressource qui n’est pas infinie, à l’inverse des données, mais surtout, plus on utilise les données, plus on en découvre l’utilité et on peut les réutiliser à l’infini. Pétrole et données ne sont donc pas équivalents et le raccourci utilisé jusqu’alors ne reflète pas la réalité. À y réfléchir, les données se comporteraient plus comme l’Atome. J’y mets un grand A, pour distinguer l’atome qui constitue toute matière, de l’Atome au sens énergie nucléaire. En effet, énergie nucléaire et données possèdent quatre caractéristiques intrinsèques identiques :

  • Elles sont infinies
  • Elles peuvent être utilisées comme énergie
  • Elles sont relativement écologiques
  • Elles ont le pouvoir de nous détruire

Des sources quasi infinies

Le plutonium a une période radioactive (demi-vie) d’environ 357 000 ans ! L’uranium de 703 millions d’années ! Certes, on ne sait pas exploiter leur énergie pendant cette durée, mais le fait est qu’un isotope radioactif émet de l’énergie pendant très, très longtemps. On sait aussi stocker cette énergie et l’utiliser quand on en a besoin. Les données qui sont collectées quotidiennement par les milliards de sites web, de smartphones, d’objets connectés et d’ordinateurs ont le même pouvoir. On les stocke, puis on les exploite et elles fournissent des informations qui servent à alimenter des moteurs économiques.

On peut se dire que nos réserves en uranium, en thorium ou en plutonium sont limitées également. D’une part, il resterait aujourd’hui environ 5 millions de tonnes d’uranium extractibles et utilisables, d’autres parts, l’évolution technologique de son exploitation, font de ce minerai une source d’énergie qui va durer beaucoup, beaucoup plus longtemps que le pétrole. Il n’est pas non plus impossible que la science apprenne, grâce aux données et aux ordinateurs quantiques, à contrôler la fusion nucléaire. Nous disposerons alors d’une source cette fois infinie, à l’échelle de l’homme, d’énergie.

Une énergie quasi gratuite

Le nucléaire est une des énergies les moins chères. Certes, l’extraction du minerai, son enrichissement, son utilisation et le démantèlement des installations coûtent très cher. Mais une fois encore, sur la durée de vie d’une centrale, c’est l’énergie qui semble, pour le moment, être la plus économique. Dans le futur, l’utilisation de microcentrales aura sans doute encore un effet sur la consommation d’énergie. Le nucléaire est appelé à un bel avenir, en dépit des réserves de nombreux écolos.

La fission nucléaire est un phénomène naturel. Le coût qui y est attaché concerne uniquement son exploitation par l’homme. On peut aussi dire que la récolte et l’utilisation des données sont quasi gratuites. Certes, ces opérations nécessitent de l’énergie électrique et des efforts humains, mais la récolte est faite de plus en plus, sans qu’elle ne coûte rien, mais qu’elle rapporte beaucoup, j’y reviendrais.

Une énergie écologique, ou presque

green tree on the forest

Le nucléaire est l’énergie la plus verte qui soi, puisqu’elle ne rejette que de l’eau dans l’atmosphère. Bien évidemment, son extraction n’est pas des plus vertes, elle est dangereuse et son traitement post utilisation posent encore des problèmes. Mais sur son cycle de vie complet, l’énergie nucléaire est sans commune mesure plus verte que l’éolien ou le solaire. Les données, comme le nucléaire, est une énergie verte, d’autant plus que les nombreux centres de données qui en permettent le stockage et le traitement sont de plus en plus alimentés par des énergies renouvelables.

Comme le nucléaire cependant, elle est une grosse consommatrice d’énergie sur son cycle de vie complet et son utilisation nécessite des réseaux de plus en plus rapides qui ne sont pas sans effet sur l’empreinte écologique d’internet. Mais c’est surtout dans leurs capacités à nous détruire que leur potentiel est le plus identique.

La destruction de la civilisation en ligne de mire

Si le nucléaire civil a des qualités et comporte des risques, on l’a vu avec Tchernobyl, Three Miles Island et Fukushima, le nucléaire militaire a le potentiel de détruire l’humanité, et la vie telle qu’on la connaît, en quelques secondes. Les données récoltées ont un pouvoir similaire, avec un twist invisible et inattendu. Avec Hiroshima et Nagasaki, on sait que certains ont survécu au feu nucléaire, mais qu’un grand nombre de victimes ont mis du temps à mourir, affectés par de nombreuses maladies déclenchées par les radiations. Avec les données, on sait maintenant qu’on peut modifier le comportement des individus. Le jeu Pokémon Go et le système chinois Sesame Credit d’évaluation du comportement social en sont deux exemples.

Si le nucléaire peut détruire physiquement l’humanité, rapidement et aussi à petit feu, les données peuvent, et sont en train, détruire notre libre arbitre. Georges Orwell écrivait dans 1984 que « la guerre, c’est la paix, la liberté c’est l’esclavage, l’ignorance c’est la force ». BF Skinner disait lui que la liberté était une illusion et le fruit de l’ignorance. Or, on ne voit pas les radiations tout comme on ne voit pas la récolte, le traitement et l’utilisation des données. Les radiations influencent le fonctionnement de notre corps et le dérèglent, l’utilisation des données dérègle le fonctionnement de notre libre arbitre et de nos décisions. Les données sont en train de détruire la civilisation telle que nous la connaissons, au bon vouloir économique d’un tout petit nombre d’acteurs, Facebook, Google, Microsoft, Amazon, Baidu, Tencent, Alibaba, au service d’impératifs purement économiques, et utilisés maintenant par les puissances politiques, comme en Chine, pour contrôler et surveiller les peuples.

La donnée, c’est Atomique !

Crédit photo Dan Meyers, Dhruva Reddy sur Unsplash

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